
15 octobre 1949 : naissance de Boualem à Teniet el Had, région montagneuse de Algérie. Son prénom berbère signifie porteur de drapeau et de science. Il est le fils de Khadjidja Benallouche et Abdelkader Sansal, qui se sont rencontrés à Oran. Abdelkader serait le neveu de Saada Kouadri, la Djéda que Boualem décrira dans Rue Darwin.

Orphelin de père, Boualem passe ses premières années à Teniet, auprès de Saada Kouadri. Sa mère s’installe à Alger en 1955, où elle se lie à un autre homme et devient infirmière. Début de l’insurrection algérienne, conduite par le FLN.

Repris par sa mère à sa grand-mère, Boualem s’installe en 1957 à Alger, dans un studio du quartier Belcourt, rue Darwin, au sein d’une famille recomposée. Le jeune Albert Camus, qui reçoit cette même année le prix Nobel, avait vécu cent mètres plus bas. L’enfance, ce sont des jours heureux, mais également l’expérience de la guerre, avec la Bataille d’Alger.
3 juillet 1962 : indépendance de l’Algérie reconnue par la France
“La paix finit par arriver cependant, après huit années de guerre, mais c’était une drôle de paix, elle ne dura qu’un jour, le temps d’un coup d’Etat, le premier d’une série, car aussitôt, le lendemain de l’indépendance, le 5 juillet 1962, la liberté gagnée par le sang a été volée au peuple comme on vole l’agrent des pauvres, avec mépris et vulgarité.”
Boualem Sansal

1963-1972 : collège et lycée Charles-Lutaud (devenu le lycée El-Idrissi) ; bachelier à 17 ans, il intègre l’Ecole polytechnique d’Alger en 1968, où il suit des cours d’électro-mécanique. Sa vocation littéraire naît durant ses années, marquées par un élan révolutionnaire et internationaliste : “Je suis tombé dans le vice du livre. Je suis parti dans tous les sens, à la recherche des poètes maudits et des écrivains rebelles.”
Boumédienne est au pouvoir depuis 1965, après avoir renversé Ben Bella.

1972-1980 : ingénieur, Boualem Sansal est rattaché au Campus de Boumerdès, non loin d’Alger, enseignant à l’Institut de la productivité et du développement industriel. Il se lie à l’écrivain Mohamed Mimouni (1945-1995).
Au cours d’une mission dans la région de Sétif, il apprend l’existence d’un ancien nazi exfiltré, converti à l’Islam et devenu cheikh local : c’est l’histoire du Village de l’Allemand, son sixième roman.
Premier mariage avec Anicka en 1974, jeune femme rencontrée à Prague lors d’un voyage d’échanges culturels. Ils ont deux filles. Ils vivront bientôt séparés.

1986 : mariage avec Naziha, une amie algérienne, à Boumerdès. Octobre 1988 : Manifestations insurrectionnelles à Alger, durement réprimées, ainsi que l’écrivain les évoquera dans son premier roman : Le Serment des barbares. Montée de l’intégrisme musulman en Algérie, aboutissant à la décennie de guerre civile (années 1990).
Durant les années 1990, Boualem Sansal occupe plusieurs postes en administration centrale : conseiller au cabinet du ministre du Commerce (1993-1994), directeur des études économiques au Conseil économique et social (1994-1996), directeur général de l’industrie et de la restructuration au ministère de l’Industrie (1996-12003).

Septembre 1999 : publication aux Editions Gallimard du premier roman de Boualem Sansal, Le Serment de barbares, une enquête policière sur fond de violence islamiste et de déliquescence sociale et politique.
En 2000, publication du deuxième roman, L’Enfant fou de l’arbre creux, mettant en scène deux condamnés à mort, un Français et un Algérien, au bagne de Lambèse.
“Ecrit pour dénoncer tout ce qui a fait des Algériens un peuple asservi… Là, je me suis senti libre. Il faut en finir avec ces barbares des temps obscurs, ces porteurs de ténèbres. La lumière n’est pas avec eux et les lendemains ne chantent jamais que pour les hommes libres.”
Boualem Sansal

2003 : Boualem Sansal est démis de toutes ses fonctions administratives en Algérie, mais continue d’occuper sa maison de Boumerdès. Sa carrière littéraire se prolonge chez Gallimard, où il est suivi par l’auteur et éditeur Jean-Marie Laclavetine (à sa gauche, sur la photo ci-contre, prise à Sarajevo, en 2000) : parution consécutive de Harraga, Le Village de l’Allemand, Rue Darwin….
2011 : Prix de la paix des libraires et éditeurs allemands, Berlin
2013 : Grand Prix de la Francophonie de l’Académie française
“Un Prix de la paix, à moi ?, me disais-je, à moi qui vis dans la guerre depuis toujours, qui ne parle que de la guerre dans mes livres, et qui peut-être ne croit qu’à la guerre, car toujours elle est sur notre chemin, et après tout nous n’existons que par elle, c’est elle qui nous fait chérir la vie, c’est bien elle qui nous fait rêver de la paix et nous incite à la rechercher, et puis hélas ainsi est notre histoire en Algérie, jamais au cours des siècles nous n’avons eu le choix entre guerre et paix mais seulement entre guerre et guerre et quelles guerres…”
Boualem Sansal, Discours pour le prix de la paix des libraires et éditeurs allemands, 2011 (repris en “Tracts Gallimard”, n° 66, 2025).

10 octobre 2013 : Gouverner au nom d’Allah. Islamisation et soif de pouvoir dans le monde arabe.
Août 2015 : publication des romans de Boualem Sansal dans la collection “Quarto”, 20 ans après la parution de son premier roman. Suivent quatre oeuvres de fiction (2084 (Grand Prix du roman de l’Académie française), Le Train d’Erlingen ou la Métamorphose des dieux, Abraham et Vivre).
20 juin 2024 : naturalisation française de Boualem Sansal, désormais écrivain francophone et franco-algérien.
« Dès son premier roman Boualem Sansal a imposé la puissance d’une littérature écrite “à la lumière des Lumières”, portée par le miracle d’une langue réinventée. “En Algérie, nous sommes analphabètes trilingues : nous avons perdu le français à cause de l’arabisation forcée, l’arabe est peu ou mal enseigné, nous avons perdu le kabyle et nos langues ancestrales.” Le seul langage qui reste à la plupart, c’est la violence. Le romancier, lui, dispose de la langue, cette langue exaltée, magnifiée par la solitude rougeoyante de la forge où se forment les phrases. »
Jean-Marie Laclavetine, préface aux Romans de Boualem Sansal (Quarto, 2015)

16 novembre 2024 : Arrestation à l’aéroport d’Alger par les autorités de police algérienne et incarcération
1er mars 2025 : condamnation en appel à cinq ans de prison

18 juin 2025 : remise du Prix mondial Cina del Duco, de l’Académie française, à Boualem Sansal. Son éditeur, Antoine Gallimard, le reçoit en l’absence de l’auteur, de la main de Daniel Rondeau, de l’Académie française

